Orange avec AFP-Services, publié le vendredi 31 mai 2019 à 09h00
Le procureur de Paris Rémy Heitz assure dans un entretien au Parisien que des policiers mis en cause pour des violences lors de manifestations de "gilets jaunes" seront renvoyés devant la justice. "C'est un changement de ton et c'est une drôle de publicité que de jeter les policiers en pâture", dénonce Loïc Travers, secrétaire national Île-de-France du syndicat Alliance.
"Je veux être très clair : il n'y a aucune volonté de ma part d'éluder ces violences ou de les minimiser." Dans un entretien au Parisien mis en ligne jeudi 30 mai, le procureur de Paris Rémy Heitz assure que des policiers mis en cause pour des violences lors de manifestations de "gilets jaunes" seront renvoyés devant la justice.
Un message qui revient, pour le syndicat de police Alliance, à jeter "en pâture sur la place publique" les forces de l'ordre "après des mois de manifestations très violentes pour lesquelles on a eu besoin des policiers et de leur professionnalisme".
"Aujourd'hui, il semblerait, alors que la mobilisation est en baisse, que certaines déclarations viennent mettre à mal la présomption d' innocence des policiers", a indiqué Olivier Houraud, secrétaire général adjoint du syndicat, dans une déclaration écrite à l'AFP.
"Les policiers ont utilisé la force légitime"
"Il n'y a pas d'impunité mais la façon dont c'est dit, avec ce ton, est extrêmement mal perçue dans nos rangs", a également réagi vendredi 31 mai sur Franceinfo, Loïc Travers, secrétaire national Île-de-France du syndicat Alliance. "C'est un changement de ton et c'est une drôle de publicité que de jeter les policiers en pâture" depuis jeudi, a déclaré le syndicaliste. "Les collègues sont éreintés par six mois de mobilisation avec des violences comme jamais" et ont droit "comme chaque citoyen, à la présomption d'innocence", a-t-il insisté. "Un moment où la mobilisation des 'gilets jaunes' est en baisse et où les policiers peuvent avoir l'esprit un peu plus tranquille, eh bien ils ne l'auront pas", a-t-il regretté.
"Les policiers, jusqu'à preuve du contraire, ont utilisé la force légitime, ce qui n'est pas le cas des casseurs qui ont utilisé la force illégitime, c'est pour ça que beaucoup d'entre eux ont été interpellés, déjà jugés, voire condamnés, et à notre sens pas assez sévèrement d'ailleurs", estime le représentant des policiers qui refuse d'utiliser le terme de "violences policières".
"La justice prend une tournure politique"
"J'ai l'impression que la justice prend une tournure politique", a de son côté indiqué sur Franceinfo Grégory Joron, secrétaire national CRS pour le syndicat Unité SGP Police-FO. Le policier "n'est plus un justiciable comme un autre", a-t-il dénoncé, déplorant le fait que ses collègues "vont se retrouver devant le tribunal correctionnel entre un délinquant de la route et un agresseur sexuel"
M. Joron remet en cause la hiérarchie."On a été reçus deux fois chez le ministre au sujet de la stratégie du maintien de l'ordre sur Paris. Le préfet de police n'a pas été entendu. On lui a donné un poste de conseiller d'État, alors que mes collègues se retrouvent devant le tribunal. Encore une fois ce sont les policiers de terrain qui vont servir de bouc-émissaire et donnés en pâture à la vindicte populaire", a-t-il déploré. Selon lui, cette annonce du procureur est une "réponse à la pression médiatique".
171 enquêtes confiées à la police des polices
Depuis le début du mouvement le 17 novembre, 2.448 personnes ont été blessées côté manifestants et 1.797 parmi les forces de l'ordre, selon des chiffres du ministère de l'Intérieur arrêtés au 13 mai.
Selon le procureur de Paris, 171 enquêtes ont été confiées à l'inspection générale de la police nationale (IGPN) et trois à l'inspection générale de la gendarmerie nationale (IGGN). Les investigations sont désormais terminées pour 57 d'entre elles et le parquet doit décider d'éventuelles suites judiciaires.Huit ont d'ores et déjà "justifié l'ouverture d'une information judiciaire", confiées à des juges d'instruction, a-t-il annoncé. Des procédures qui concernent des faits revêtant une qualification délictuelle mais aussi criminelle, selon une source judiciaire.