Pour Elon Musk, son fondateur et patron, Tesla n'a jamais été qu'un simple constructeur de voitures électriques. Mais une société technologique dont la vocation est d'innover dans le domaine de l'énergie. Jeudi 30 avril, l'entrepreneur d'origine sud-africaine a fait un nouveau pas dans cette direction, avec la présentation Tesla Energy, une gamme de batteries dites stationnaires, destinées aux habitations, aux entreprises et aux producteurs d'énergie.
« Le monde est principalement alimenté par les énergies fossiles. Nous devons faire quelque chose. Notre but est de transformer totalement l'infrastructure énergétique mondiale pour la rendre totalement durable et sans produire d'émissions de carbone », a-t-il lancé au cours d'une conférence de presse organisée au siège de l'entreprise à Hawthorne, dans la banlieue de Los Angeles. M. Musk ne veut pas seulement accélérer la transition énergétique. Il rêve d'une planète où toute l'énergie consommée proviendrait de ressources renouvelables. « Je crois que cela est à la portée de l'humanité », prophétise-t-il.
La solution : le soleil, « qui se lève tous les matins et fournit une quantité incroyable d'énergie », poursuit M. Musk. Mais l'énergie produite par les panneaux solaires doit être stockée afin d'alimenter maisons et usines lorsque le soleil ne brille pas.
« Les batteries existantes sont chères, moches et peu fiables. Et elles fonctionnent sous différents systèmes qui ne sont pas compatibles. Il n'est aujourd'hui pas possible d'acheter une batterie qui fonctionne facilement ».
Des batteries qui pourront être combinées « à l'infini »
Tesla Energy entend remédier à ce problème avec deux modèles. Pour les logements et les petites entreprises, la société va commercialiser la PowerWall. Ses dimensions sont modestes: 1m30 de haut, 86 cm de large et 18 cm de profondeur. Et son apparence particulièrement soignée. Plusieurs couleurs seront même disponibles. Elle s'accrochera à un mur, à l'intérieur ou à l'extérieur. Deux versions seront vendus cet été aux Etats-Unis, d'un capacité respective de 7 kWh et de 10 kWh.
Si cette annonce était attendue, la principale surprise est venu du prix: 3 500 et 5 000 dollars, hors frais d'installation. Avant la présentation, Cosmin Laslau, analyste chez Lux Research, espérait une fourchette allant de 6 000 à 8 000 dollars. Les prévisions dépassaient souvent les 10 000 dollars.
De plus, cette facture pourrait être adoucie si les différentes administrations américaines accordent des déductions fiscales, comme elles le font déjà pour l'installation de panneaux électriques.
Pour les grandes entreprises et les producteurs d'énergie, Tesla Energy proposera la PowerPack, d'une capacité de 100 kWh. Ces batteries pourront être combinées « à l'infini », promet M. Musk. La société va mener des programmes pilotes au cours des prochains mois, alimentant par exemple un data center d'Amazon et plusieurs supermarchés Target. Une centrale électrique détenue par une filiale d'Edison International testera également ces batteries.
Les batteries de Tesla pourront être reliées à des panneaux solaires, mais aussi branchées sur le secteur. Dans ce cas de figure, elles permettront de réduire la facture d'électricité : rechargées pendant les heures creuses, elles alimenteront habitations, usines et bureaux aux heures pleines. « Il faudra cependant plusieurs années pour rentrer dans ses frais », prévient M. Laslau. Autre cas d'utilisation: un générateur de secours en cas de coupure de courant.
La Californie, possible premier marché
Tesla n'est pas la première société à se lancer sur ce marché, où General Electric, Samsung ou encore LG sont déjà présents. Mais elle dispose d'importants avantages sur la concurrence. Outre son image de marque et son pouvoir marketing, elle bénéficiera certainement de ses liens étroits avec SolarCity, dont M. Musk est président du conseil d'administration.
L'entreprise californienne installe environ un tiers des panneaux solaires résidentiels aux Etats-Unis. Les deux groupes ont déjà mené une phase de tests pour équiper quelques centaines de maisons en batteries.
Tesla Energy pourra également s'appuyer sur la technologie propulsant ses voitures électriques. Cela lui permettra de bénéficier d'importantes économies d'échelles pour abaisser les coûts de fabrication. Cet atout sera encore plus grand après l'ouverture de sa prochaine usine, baptisée « gigafactory ». Ce gigantesque site, implanté dans le Nevada, produira un nombre record de batteries lithium-ion.
M. Laslau estime que les coûts de fabrication par kWh passeront de 266 dollars à 172 dollars au cours des dix prochaines années. A court terme, la majorité des ventes pourraient être réalisées en Californie, où l'énergie solaire représente déjà 5 % de la production globale. L'Etat le plus peuplé des Etats-Unis veut porter cette part à 33 % d'ici à 2020. Il va également contraindre les électriciens à s'équiper d'importantes capacités de stockage.
A plus long terme, les opportunités seront nombreuses pour Tesla. Les analystes de Deutsche Bank estiment que la société pourrait générer jusqu'à 4,5 milliards de dollars par an sur ce marché. C'est davantage que le chiffre d'affaires réalisé l'an dernier.