Je vis en Bretagne, où les fées sont Margot ou Morgane, où les lutins sont Korrigan.
Près Le Gouray, en Côtes d’Armor, se trouve une colline magique nommée le Mont Croquelien. Butte aux arbres bonzaïs et aux rochers tourmentés, cet antique sanctuaire appartenait jadis à la grande Brocéliande, forêt granitique qui couvrait tout le centre Bretagne. Dans les terres, chacun vous le dira : le Mont Croquelien est le berceau des fées Margot.
« La reine Marguerite de Valois était surnommée La Reine Margot, un surnom popularisé notamment grâce à la pièce de théâtre éponyme et au roman éponyme d’Alexandre Dumas au XIXe siècle. Puis la forme Margaux a été popularisée de manière plus récente, d’après le grand vin du même nom : le Château Margaux, dont le second élément Margaux est lui-même une variante de Margot. Ernest Hemingway, grand amateur de Château Margaux, compte parmi les premiers à avoir prénommé sa fille Margaux, sous cette forme orthographique » (source)
C’est du moins ce que dit Wikipédia. Mais qui dit que Marguerite de Valois fut une fée ? Elle aurait fait une meilleure sorcière, selon moi; même si la différence entre fée et sorcière n’est souvent qu’une figure de style. Les femmes de grand pouvoir sont des fées, elles sont aussi des sorcières, tout dépend de l’imaginaire de celui qui les croise.
Il y a deux sortes de fées. Les fées des contes sont de demi-déesses; elles jouissent d’un pouvoir surnaturel par droit de naissance ; les fées des vieux romans de chevalerie ont acquis leur pouvoir à un moindre degré, par l’étude des livres de magie
C’est à cette seconde classe qu’appartiennent entre autres Viviane et Morgane, fées célèbres dans la fabuleuse histoire des chevaliers de la Table-Ronde. Morgane est sœur du roi Arthus ou Arthur, c’est à dire l’Ours, fondateur de cet ordre laïc
Elle est présentée comme une fée malfaisante qui harcèle la trop tendre Genièvre, épouse d’Arthur. Viviane, jalouse protectrice du courageux Lancelot du Lac, a été mieux traitée par les anciens romanciers.
La Bretagne est un pays de fées. Leur demeure se trouve sous les rochers et dans la forêt. La vallée des fées se trouve à Concoret, sur le bord nord de la forêt de Brocéliande ou de Paimpont, aux confins du Morbihan et de l’Ille-et-Vilaine. Concoret est un nom d’origine bretonne, kon-jored, qui veut dire la vallée des fées.Le royaume des fées Margot est situé dans le plus profond de la terre. On peut y parvenir à Croquelien, par une nuit de pleine lune aux douze coups de minuit.
Un tunnel s’ouvrirait vers les profondeurs de la terre. Gare aux imprudents, on dit que les Margots n’aiment pas les curieux. Cependant, leur village de rocs au sommet du Mont Croquelien nous permettent de satisfaire notre curiosité et d’en apprendre un peu plus sur leurs habitudes. Par beau temps, elles aiment se baigner dans une baignoire en granite. Pas à la portée de tout le monde !
N’obéissant qu’à leurs ordres, les énergies magiques du vent et de l’eau ont creusé la roche au fur et à mesure. Les fées Margot sont des petites futées; leur baignoire sur le Mont Croquelien jouit d’une magnifique vue sur la Baie de Saint-Brieuc, distante de 30 km. (source)
Mouais. Si vous voulez mon avis, des outils bien affûtés ont pas mal aidé les forces magiques de la nature pour creuser des baignoires aussi parfaites, et comme par hasard juste à la taille d’un corps humain. Les druides savaient combien l’eau de Jade est précieuse, à condition d’être recueillie sous forme de pluie d’orage, et de séjourner pendant une lune entière à l’air libre, dans un bassin de pierre exclusivement. Tout contact avec le métal, notamment, pourrait détruire les vertus merveilleuses de l’eau de Jade. Les antiques civilisations de la foudre avaient toutes unegrande maîtrise de l’hydraulique pour cette raison précisément.
Ici la mer est lointaine, elle reste pourtant visible au fond de l’horizon pour nous rappeler que le pays des Margot n’est pas celui des Morgane. En les confondant toutes deux, Wikipédia affiche encore son ignorance : « Les Margot ou margotines sont, dans les traditions bretonne et galloise, des fées champêtres. Excellentes danseuses, elles sont le plus souvent généreuses et proches de la nature.
Leur nom provient vraisemblablement d’une déformation de Morgane, la célèbre fée de la légende arthurienne, nom dérivé du vieil irlandais Muirgen signifiant « née de la mer ». Elles étaient d’ailleurs nommées « Morgane » à l’origine en Basse Bretagne » (source)
Méfiez-vous de tout, la matrice est partout, mais pas la Résistance
Mettons un peu d’ordre dans ce salmigondis de fausse érudition. La Bretagne est terre de traditions, qui méritent tout notre respect. Morgane est une déformation du breton Morrigan, qui est la forme féminine de Korrigan. Les Morrigan sont les fées du rivage, liées aux sortilèges de la mer et des ondes, et d’ailleurs apparentées aux Ondines.
Elles sont le pendant féminin du dangereux Korrigan nommé Yann An Aod,Yann de la Côte, dont la sinistre silhouette à la nuit tombée évoque de sulfureuses histoires de pirates, qu’on appelait jadis les Frères de la Côte. Eh oui, comme Yann.
Quant à la chère et susceptible Margot, elle n’a rien à voir avec le sable, les vagues et le varech. Son domaine est de fougères, de mousses et de chênes rabougris.
Margot n’est absolument pas une déformation de Morrigan. Les Margot, natives de Croquelien, sont les fées de l’intérieur, les fées champêtres et sylvestres du centre Bretagne.
Or ce centre Bretagne se nomme Argoat, qui a donné le motargot. L’Argoat, la Bretagne des bois, s’oppose à la Bretagne du littoral nommée Armor. Les Margot ou plutôt Margotte sont des Ma(m) Argoat, desMères des Bois.
Mères, car elles étaient là avant les humains. Mais ne les croyez pas maternelles pour autant. Si vous en surprenez une toute nue dans son bain de granite, vous risquez fort de sentir ses griffes. Protégez vos yeux, malheureux ! Et fuyez sans vous retourner !!