La Porte Mystérieuse du Mont-Saint-Michel – Le Sentier de Daath
« Là où je veux en venir, Pierre, c’est qu’il existe sur Terre des lieux très particuliers, très rares et longtemps tenus secrets, où le Feu d’en Bas rencontre le Feu d’en Haut. Ces lieux sont des lieux de passage, des lieux initiatiques, qu’on appelle aussi portes entre les mondes. L’énergie de la Vierge y rencontre celle de la Vouivre, pour ouvrir le Cœur de l’Homme aux mystères de la Création.
Celui qui a vécu l’initiation dans l’antre de la Vouivre, dans la caverne du Dragon, en ressort régénéré.
On parle de Renaissance. »
Bertrand Leroy, Le Sentier de Daath
« Mais qu’est-ce que c’est que ton truc ?! De quoi ça parle, dans quelle case je dois le mettre ? »
Bonne question l’ami libraire, d’autant qu’on me la pose souvent depuis la publication du bouquin. Roman, thriller, new-age, tourisme, philosophie, magie, témoignage, chamanisme, histoire, développement personnel ? « Ben lis-le, mec ! », aurai-je envie de répondre… Mais l’inconnu fait peur, et lire prend un temps qu’on a pas forcément envie de perdre. Alors j’essaie de donner une piste, je tâtonne, j’y vais en douceur…
Si, si, il y a les cartes du Sentier pour marcher jusqu’au Mont-Saint-Michel à la fin, avec les indications quand il faut tourner à gauche, le contenu du sac-à-dos idéal, la recette de la lessive à la cendre, de l’huile de millepertuis, et des nouilles aux orties. Regarde, j’ai même mis la liste des hébergements, pas facile à trouver ça ! Et puis j’explique comment faire du feu sans allumettes, c’est pratique ça si t’as pas de briquet !
Surtout, ne pas effrayer… Car ce livre est un piège, un broyeur d’intellect, un abîme, le Sentier de Daath. Un livre dont VOUS êtes le héros, si vous acceptez le deal, et décidez de prendre un bâton pour mettre en marche votre machinerie biologique, bourrée de nerfs et d’influx électriques, de sang chaud, de muscles et d’os.
Heureusement, il est bien distribué, merci Alphée, donc on finit toujours par lui trouver une place, il est même à la FNAC, je trouve ça drôle, car jamais je n’aurai imaginé que ce livre soit accessible facilement.
Mais après tout, je ne récolte que ce que j’ai cherché à semer: un dynamitage des genres, et des cloisons… Et quand il n’y a plus rien, qu’est-ce qu’il reste ? Un trou noir, ou pas, où l’on accepte de plonger et de se dissoudre, page après page, que l’on traverse, ou que l’on fuit, exaspéré, ou exténué.
Living on the Edge !
D’autant que tout est fait pour brouiller les pistes, comme cette couverture, où ne figure même pas le terme de Roman… Car si ce n’en était pas un ? Un titre passe-partout, bien trop long, mais avec un Mont-Saint-Michel dedans, c’est plus accrocheur et faut bien en vendre quelques uns.
Idem pour la photo, le profane n’y verra que du feu, au mieux, toujours ce fameux Mont découpé au laser de Photoshop qui fait déplacer des millions de touristes chaque année. Mais l’initié (c’est qui lui ?), ou le visiteur aguerri sera plus attentif. Car la photo où s’est greffée le Mont est rare, très rare… Il s’agit de la crypte de Notre-Dame-sous-Terre, la racine du Mont.
La pierre qui se découpe, dans l’ombre de l’Abbaye, fut posée par Saint Aubert, au VIIIe siècle. Sur l’appel d’un rêve, première trace onirique de cet héritage rayonnant sur le Monde.
Et il y a ce sous-titre, «Le Sentier de Daath»… La clé à 3 pans de cette fameuse Porte mystérieuse.
- Le Psychédélisme, avec le célèbre acronyme L.S.D. L’alcaloïde de l’ergot de seigle, utilisé selon Hoffman lors de la célèbre anabase d’Eleusis. - L’Alchimie, avec l’étymologie Fulcanellienne du mot Sentier/stibia, qui a la même racine que la fameuse stibine/Antimoine, la matière première de l’Oeuvre. - La Kabbale, avec cette non-séphira, cette Sphère magique, secrète, l’Epreuve entre l’Esprit/Kether, et le Coeur/Tiphereth.
Bon, on peut donc commencer à voir un peu plus de quoi ça parle, si on se gratte un peu la tête. Normalement, tout est expliqué dans le bouquin, mais je voulais laisser ce signe visible à l’extérieur. Mon glyphe à moi… Posé sur cette couverture et sous ce titre très « nouvelle spiritualité », le signe de la plante vénéneuse, parée de ses belles couleurs, mais portée sur le pyjama blanc.
Donc ça parle de psychédéliques, pas n’importe lequel, un des plus puissant et intriguant de la Terre, relié au peuple des Pharaons et aux Pygmées, en provenance direct des étoiles selon la Tradition: l’Iboga.
Bon, je parle aussi de l’Ayahuasca et de la Psilocybine, faut pas faire de jaloux non plus, c’est pas le but, oh non ! Mais ça cause aussi d’Hakim Bey, d’Avatar, de TAZ, d’Internet, de Deleuze, de 2012, ou 2011, de Crowley, de Badiou, de Myazaki, de Sarkozy, de Lovecraft, de Matrix, de Guénon, de chakras, de glande pinéale, de Servan-Schreiber, de Star-Trek, des Mayas, des frères Bogdanov, et de fond diffus cosmologique.
Mais ça parle surtout du Christ, de la Vierge, et d’un vieux Dragon. Après faut pas trop le dire aux Chaotes, car j’ai même réussi à glisser une photo de Jésus à la fin du livre, et ils pourraient trouver ça vieux jeu…
On s’intoxique aussi pas mal, on s’empoisonne, car la Vie est Toxic, comme le chante Britney Spears. On y cherche le Graal, on croise Lancelot et Guenièvre, la terrible Morgane. Certains disent même qu’on y aperçoit la Pierre Philosophale… On y rencontre enfin de vieilles églises poussiéreuses où on allume des cierges, et où on prit, face contre terre. Soyez prévenus !
Le tout saupoudré du funk de Fela, du rap de Hamé, et de cantiques de David.
Bon allez, comme il fallait bien que j’essaie de donner une cohérence à tout ça, j’ai cherché un plan. J’ai pris le plus simple qu’On m’ait inspiré, la Croix. Ça se déplie donc en 2 axes, 2 chemins, horizontal, et vertical. L’axe horizontal, c’est ce chemin du corps, la marche, ces 4 étapes de Champ secret au Mont-Saint-Michel. Les ampoules, la sueur, la fatigue, mais aussi la Rencontre, celle de Clara, car le corps, c’est beau aussi. L’axe vertical, c’est le chemin de l’esprit, l’anabase, le retour à la Source, la décristallisation de ce Flux qui nous bombarde chaque jour en passant par la Philosophie, la Magie, la Gnose, et la Mystique. Merci Tomberg. Là encore, 4 étapes, de Malkuth à Kether, la Voie de la Flèche.
Bien sûr, ça se croise tout ça, et comme la géométrie fait bien les choses, ça se passe en Tiphereth, le Coeur où fleurit la Rose de la Croix. Alors évidemment, certains, plus curieux que d’autres, me demandent à la fin si c’est une histoire vraie, si ça existe les Stalkers ? et je réponds qu’on s’en fout, car cette histoire fait déjà partie du passé. La suite, c’est celle qui s’écrit avec vous qui lisez ces lignes, et c’est elle qui m’intéresse aujourd’hui.
D’autres trouveront ça maladroit, mal écrit, incompréhensible, chiant, ça me touchera, c’est sûr, et ils auront raison aussi. Après, je leur dirai que c’est un premier roman, mea culpa, j’ai appris sur le tas, on ne peut pas plaire à tout le monde, etc.
Sinon, le livre a été imprimé en pleine éruption solaire.
Les peuples se réveillent.
Le New York Times vient enquêter sur les illuminés de Bugarach.
Mince…
Manquerait plus que ce soit prophétique en plus !
Bon, et comme ce travail est maintenant terminé, je retourne sur le Sentier, car comme le dit Arthur, « j’ai besoin de ce rapport à la vie, besoin de sentir son souffle glisser en moi. De retourner dans la Zone… C’est mon rôle, Pierre, ça fait partie du Plan.»
Mais je garde un iPhone avec moi.
Car le Sentier existe maintenant dans un autre monde, celui de l’Araignée, celui du Web.
Bertrand Leroy www.neostalker.org
Jeune trentenaire parisien, Pierre voit sa vie basculer le jour où il décide de partir marcher vers le Mont-Saint-Michel. Ce voyage l’emmènera sur les traces d’une ancienne Connaissance, où se mêlent Alchimie, Philosophie et Chamanisme.
La rencontre d’Arthur, son guide, et de Clara, l’ouvre alors à une dimension du Monde dont il ignorait tout: celle de l’Amour et d’un Combat permanent entre Fraternités en vue de sauver l’Humanité de sa destruction prochaine.
A mi-chemin du thriller et du roman initiatique, quête du Graal revisitée, Le Sentier de Daath explore les liens qui peuvent se tisser entre science et mystique. Boîte à outils gnostiques, magiques et philosophiques, trait d’union entre l’ésotérisme occidental et le savoir des peuples premiers, il dévoile au lecteur une nouvelle façon de vivre le monde, à l’écoute de son Cœur et du rythme de la Nature.
Loin de la fiction, ce récit d’une histoire vraie se veut avant tout un guide pour le marcheur qui sommeille en chacun de nous. Il regroupe ainsi l’ensemble des cartes du Sentier, la liste des hébergements, le matériel nécessaire ainsi que de nombreux conseils pour se lancer dans une telle aventure, sur le Chemin du Paradis…
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Bertrand Leroy – Le marcheur du Sentier
interview de http://lesaraigneesauplafond.wordpress.com/
Peux-tu te présenter ?
Tout d’abord, merci à toi de m’inviter dans ton blog. Et puisqu’il faut passer par la case présentation pour jouer le jeu de tes si bonnes questions, je vais m’y plier, ou plutôt m’y dé-plier…
34 ans, informaticien, skipper, infirmier. Trois étiquettes assez hétéroclites, mais qui pourtant me construisent. Passionné dans ma jeunesse par la science et la méthode scientifique, c’est tout naturellement que je me suis lancé dans des études dites mathématiques, jusqu’à faire un saut, rapide, dans les classes prépas.
Bercé par un lot d’illusions dont je n’ai eu de cesse de me défaire depuis, j’espérais trouver dans la recherche un sens à une existence que je pensais modélisable, ou tout le moins intelligible. Mais plutôt que de la joie et de la connaissance, je m’effondrais dans le marasme, un savoir poussiéreux et un univers à forte tendance névrotique et arrogant, jusqu’à réaliser que je n’avais aucune envie de ressembler aux gens qui m’enseignaient, ni à ceux qui m’accompagnaient sur ce chemin.
Profitant de la «bulle internet» et de l’effet «coupe du monde», j’abandonnai alors, sur un coup de tête, famille, amis et études pour une petite île du bout du monde: la Réunion. Parenthèse enchantée où je découvris un autre mode de vie, bercé par le zouk, le soleil et le zamal. Je m’exerçais alors tant bien que mal à gagner ma vie comme formateur informatique pour quelques élèves de BTS, entre lagons, randonnées et farniente.
Puis vînt le choc du 11 septembre, électrochoc programmé qui vînt me réveiller de cette torpeur tropical, où les mois filaient comme des semaines. La communauté dans laquelle je vivais explosa, chacun rattrapé par ses vieux démons, et je me retrouvai au même moment plongé dans un monde inconnu, celui du new-age, du conspirationnisme, et de la contre-culture…
De retour en France, je décidai d’abandonner l’informatique, et de me consacrer à ma première passion adolescente: la navigation. Je plaçais mes pas, ou plutôt mon sillage, dans ceux des héros qui avaient bercés mon enfance: Moitessier, Janichon, Scolum, Monfreid… Et m’inscrivis au concours de skipper auprès de la marine marchande.
A bord d’un petit voilier acheté avec un ami, j’écumais alors les mers, guidé par le vent et les embruns. Soulagé de ne plus avoir à entendre parler de SQL, Java et autres matrices de gestion, je retrouvai la simplicité du chant des drisses, la chaleur du café au milieu d’un coup de vent, de la lumière d’un rayon de lune sur le plancton phosphorescent. Au point que je décidai de tenter de gagner ma vie de cette passion et de partir pour Antibes, à la recherche d’embarquements.
Triste erreur, qui vînt là aussi briser quelques illusions sur ce que j’espérai être le voyage, mais qui se transforma bien rapidement en une sorte de tourisme rutilant et vulgaire, à bord de yachts où seul le CV me différenciait du statut d’hôtesse.
Le troisième réveil sonna en Inde, où je me rendis suite à la rencontre bouleversante d’une sage indienne, Amma, et d’un pèlerinage initiatique vers Saint-Jacques-de-Compostelle. Expérience profonde et transformatrice, je débarquais sur une nouvelle terre, où la misère des corps côtoie la plus belle joie des âmes. Odeurs, paysages, chants, épices, mystiques qui me guidèrent vers ce que la mer m’avait laissé entrapercevoir : la spiritualité, la beauté de la vie et vers le plus beau des cadeaux, celui de la paternité.
Reclus dans l’Himalaya, je décidai donc de rentrer en France pour retrouver celle qui deviendrait ma femme, et rencontrer mon fils.
Animé par un nouveau souffle, je choisis de me réorienter vers l’Homme, dans un savoir-faire réel et une technicité organique capable de m’affranchir sur tous les continents, abandonnant la virtualité informatique et le tourisme pour devenir infirmier.
Ces études furent passionnantes et j’orientais mon mémoire vers un phénomène que je trouvais on ne peut plus troublant: l’effet placebo. En effet, j’étais stupéfait lors de mes stages par la puissance d’un simple verre d’eau sur de nombreux maux, et au lieu d’en rire comme de nombreux collègues, je tentai d’en savoir plus. De fil en aiguille, je remontai ainsi de la phytothérapie à la sorcellerie de nos campagnes, jusqu’aux médecines dites primitives, et ce que l’on nomme abusivement chamaniques.
Car au-delà du folklore et des apparats, il m’apparaissait de plus en plus clairement que pour être efficientes, ces médecines traditionnelles devaient s’appuyer sur ce que notre science nomme E.N.O.C. ou Etats Non Ordinaires de Conscience, et que nous étions très peu informés sur le sujet, d’autant que ces ENOC étaient très souvent provoqués par l’absorption de plantes dites maîtresses, assimilées à des poisons par nos scientifiques.
J’embarquai donc pour le Gabon, à la rencontre du peuple pygmée pour en savoir plus sur cette médecine du corps et de l’esprit, jusqu’à pénétrer certaines des arcanes les plus secrète d’un rite initiatique méconnu: le Bwiti. A mon retour, ma vision de ce que l’on nomme réel fut une nouvelle fois transformée, épurée je dirai. Et j’entamais un long processus de dépliage pour tenter de partager ce que j’avais entr’aperçu là-bas.
Tu as donc écrit ce livre, “La porte mystérieuse du Mont-Saint-Michel” : pour les visiteurs du blog qui ne l’auraient pas encore lu, peux-tu nous dire ce dont il s’agit ? Quelle est la genèse de cette histoire qui semble largement autobiographique ?
Ah ça ! Drôle d’histoire que l’écriture de ce bouquin ! D’aussi loin que je me souvienne, j’ai toujours entendu dire autour de moi qu’un jour, j’écrirai un livre… Ce qui aurait dû sonner comme une bénédiction se changea rapidement en malédiction, puisque les années passaient, et qu’aucun mot ne sortit jamais de ma plume, fut-elle numérique. Angoisse de la page blanche, colère, tristesse de ne pouvoir exprimer ce que je ressentais, la frustration dominait par rapport à ce rêve d’écriture…
Alors que je finissais d’en faire le deuil, pensant que je n’étais sûrement pas le seul à ne pas avoir les moyens de mon ambition, et que ce n’était pas si grave, je partis marcher par hasard sur un chemin tombé dans l’oubli passant juste sous ma porte: le Sentier de pèlerinage du Mont-Saint-Michel.
L’expérience du pèlerinage à Saint-Jacques-de-Compostelle m’avait laissé un si beau souvenir que j’étais ravi de pouvoir retenter l’expérience, au pied de chez moi, dans l’Orne. Et cette marche changea ma vie, toute ma vie… A mon retour, le plan de ce que j’avais à écrire m’apparut clairement, limpide comme le cristal, et tout se mit en place.
Ne me manquait plus que le temps pour le faire, et comme l’Univers est bien fait, je me blessai à la cheville, suffisamment gravement pour obtenir un arrêt de travail de 3 semaines où je me mis à écrire, jour et nuit, dans une sorte de fièvre créatrice, ou transe, je ne sais pas, mais qui me consuma et me permit de synthétiser ce parcours atypique jusqu’à ce jour J, à écrire devant mon écran.
Autant le document biographique ne m’intéressait pas, car je ne peux concevoir un moi-je si puissant qu’il mérite de se coucher par lui-même sur le papier pendant 300 pages, autant la forme romanesque, l’éclatement de la psychée en plusieurs personnalité, la division atomique d’une molécule de conscience m’offrait une liberté et un jeu avec le lecteur inédit.
Alors bon, de quoi ça parle cette «Porte Mystérieuse du Mont-Saint-Michel» ?
Tout d’abord, j’aimerai insister sur le fait que le titre original de ce livre est «Le Sentier de Daath», mais qu’il n’a pas été retenu par l’éditeur car jugé trop obscur pour le néophyte. En effet, pour moi, il s’agissait avant tout de décrire le chemin, plutôt que le but.
Pour résumer, il s’agit de l’histoire de Pierre, un jeune citadin en crise existentielle qui reçoit un beau jour un mail l’invitant à une marche vers le Mont-Saint-Michel. Son guide, Arthur, l’initie alors, au fur et à mesure de leur randonnée, à la véritable nature de l’esprit humain, et au potentiel inexploré de sa conscience.
Ainsi, à la perpendiculaire de cet axe horizontal, celui du corps et de la marche, se greffe un axe vertical, celui de l’esprit et de la spiritualité. Une croix où vient s’entremêler, en son centre, l’Amour, et la rencontre de Clara, une jeune femme mystérieuse, qui le guidera vers le plus profond secret de son âme.
Sur ce plan graphique simple, la Croix, j’ai ainsi pu déplier ces vingt années de recherche, qui m’avaient emmené des bancs poussiéreux des amphithéâtres aux bancs tranchants des coraux, de l’Inde à l’Afrique, de Sri Aurobindo à Gilles Deleuze, de Brocéliande à la jungle équatoriale, de l’Alchimie au Chamanisme, des fêtes étudiantes enfumées aux rites initiatiques les plus radicaux de la planète, de la naissance, à la re-naissance… Tous ces pôles que je pensais divergeant en moi s’équilibraient enfin pour dévoiler une voie enfin équilibrée, celle du milieu.
Enfin, à la fin de l’ouvrage, j’insérai quelques annexes, notamment les cartes et les indications permettant d’arpenter le Sentier, en accord avec l’Association des Chemins de Saint-Michel qui me fut d’un grand recours pour l’exploration terrestre du chemin, mais aussi le contenu du sac-à-dos idéal, les hébergements, quelques recettes de cuisine, comment faire du feu, de la lessive, apprendre à s’étirer, etc. Une sorte de guide de survie douce, telle que l’enseigne François Couplan, célèbre botaniste qui m’aura lui aussi été d’une aide précieuse pour la rédaction du livre.
J’ai ainsi tenté, le plus humblement possible, d’esquisser ce fameux trait d’union entre mon regard scientifique, chamanique et alchimique pour proposer une aventure où chaque lecteur pourrait, s’il le souhaite, se décider à se mettre en marche pour valider, ou non, l’expérience vécue par Pierre. Car contrairement à de nombreux livres initiatiques, je souhaitais que le sentier du héros soit plus ou moins reproductible, et s’ancre dans notre matière au lieu de rester dans l’ordre du fantasme ou du rêve plus ou moins accessible.
Tu te fais le passeur d’une voie finalement peu connue, la voie du milieu. Un équilibre entre philosophie, mystique, gnose et magie. Que représentent ces quatre piliers sur la voie ? Comment se manifestent-ils dans ton quotidien ?
C’est là toute la subtilité de l’Œuvre alchimique, qui nous fait passer du grossier au subtil, ou de cet adage qui nous fait dire que ce qui est juste doit s’énoncer clairement. Au point que l’accumulation de savoir, engendré notamment par internet et l’évolution de notre cortex, nous coupe de l’Essentiel et qu’une voie aussi évidente que celle du milieu finisse par devenir peu connue, comme tu le fais remarquer…
Ces 4 piliers dont tu parles, Philosophie, Magie, Gnose et Mystique représentent ce que les anciens nomment la cristallisation de l’Esprit, et que je nomme Flux dans le livre, où j’évoque sa densification.
Il est à mon sens très pertinent de les mettre en regard avec les 4 axes de Badiou permettant le dépliage de l’Evénement et qui sont la Politique, l’Art, la Science, et l’Amour.
Car cette voie du milieu ne peut s’exprimer que dans la pleine complétude de l’homme, qui est à la fois spirituel, et matériel.
C’est là le principal reproche que je ferai aux mouvements dits spirituels, qui bien souvent oublient la dimension physique de l’homme, son horizontalité. De la même façon que je reproche à notre société l’oubli, voir le déni, de la dimension spirituelle de l’homme. On retrouve ici l’opposition entre l’Être et l’Avoir, l’Essence et la Personnalité si chères à Gurdjieff.
Voilà donc la subtilité de cette voie du milieu, qui doit s’équilibrer à la fois sur le plan horizontal, mais aussi sur le plan vertical.
Alors comment tout cela peut-il bien se manifester au quotidien ? En même temps que je te parle, j’ai l’image de cette spirale au nombre d’or, le vortex de Fibonacci, un aller-retour permanent entre les dualités, dans la douceur et l’expansion qu’offre ce dessein. Un équilibre gyroscopique, l’esprit du Beyblade te diraient mes enfants !
J’aime étudier la Philosophie, mais avant tout, j’aime l’exploration de ses concepts et la perspective Politique qu’ils offrent, de même que j’aime la Magie et ses rituels, mais que leur propos reste avant tout pour moi la manifestation de l’Art et les ponts qui se tissent entre la matière et l’esprit.
La Gnose, mais peut-être les lecteurs ne sont-ils pas familier avec ce terme, est le reflet de la Science pour les choses spirituelles. La Science est l’analyse par notre mental des choses d’en-bas, de la matière, tandis que la Gnose serait la perception par notre «âme» des choses d’en-haut, de l’esprit.
Là encore, la voie du milieu reste pertinente, car elle permet un focus à la fois subtil et rationnel.
Jean-Claude Flornoy, mon ami regretté et restaurateur du Tarot de Jean Noblet insistait souvent sur ce rôle du Passeur, comme tu l’appelles, le Stalker du Sentier, dont le devoir est la mise en mot de la Gnose et de son vocabulaire symbolique. On retrouve d’ailleurs, à très haut niveau dans les mathématiques, la même abstraction, beauté et pureté symbolique que les paysages spirituels rencontrés lors des voyages aux confins de la conscience humaine…
Quant à la Mystique, elle est bien évidemment pour moi indissociable de l’Amour. Tous les mystiques tentant de nous décrire cette fusion évoquent, sur tous les continent, une Lumière aveuglante les enveloppant d’Amour, et mon expérience va en ce sens… L’Evénement Pur, l’Immobilité, la Conscience originelle qu’une brise vient caresser, comme la corde d’une harpe lançant son chant dans l’infini des dimensions.
Car au-delà de notre expérience terrestre, c’est avant tout d’Amour dont il est question, et l’on remarquera avec plaisir que c’est bel et bien le Cœur qui est présent au centre de l’homme, à la croisée des chemins, sur cette voie du milieu…
« Tant d’hommes cherchent aujourd’hui à l’extérieur ce qui se trouve à l’intérieur d’eux-même. »
La voie du milieu, c’est donc aussi la voie du coeur, qui est à la croisée de bien des grilles de lecture. Voie ou voix, est-ce qu’arpenter la voie du milieu, c’est aussi être à l’écoute de quelque chose en particulier ?
Tu mets le doigts sur le secret de cette voie du milieu, qui est justement de réveiller dans l’homme ce que je nomme, mais je ne pense pas être le seul, la Voix du Cœur.
Je te parlais tout à l’heure de la densification du Flux, cette façon qu’a l’Esprit de se manifester jusqu’à nous, de l’Amour mystique, aux symboles gnostiques, aux images magiques, jusqu’aux mots philosophiques. Il s’agit bel et bien d’un phénomène de croissance, tout comme une graine en terre finit par germer pour grandir et finalement donner des fruits.
Cette graine mystique est plantée à peu de chose près dans notre cœur physique, physiologiquement dans le thymus, une glande endocrine encore mystérieuse de nos jours qui s’atrophie dès la puberté. Tout le propos de cette voie du Cœur et de réveiller la voix du Cœur, autrement dit une ré-ouverture du thymus permettant la production d’une hormone, qualifiée de christique par la Tradition qui interagit avec la glande pinéale de l’homme, lui permettant de se décalcifier et d’imager le flot d’informations de cette voix cardiaque, nommée Intuition par les descendants d’Hermès.
L’Essentiel est invisible pour les yeux, on ne voit bien qu’avec le Cœur…
Antoine de Saint-Exupéry livre là toute la quintessence du message alchimique et gnostique, à savoir l’ouverture du regard de l’homme à sa dimension spirituelle.
Tant d’hommes cherchent aujourd’hui à l’extérieur ce qui se trouve à l’intérieur d’eux-même. Le Cœur est l’unique boussole sur cette voie du milieu, ce pilier de l’Équilibre comme on le nomme dans la Kabbale. «J’aime», «Je n’aime pas», ce sentiment est à même de nous guider sur le plus beau des Sentiers, celui de notre vie et de notre légende personnelle.
La difficulté est que dès le début de la puberté justement, l’enfant apprend à étouffer ce sentiment, pour se brancher sur des guides plus rationnels pour notre société, généralement le sexe, ou l’intellect, mais qui nous éloignent inéluctablement de qui nous sommes. Pourtant, de nouvelles études, américaines notamment, tendent à démontrer que les personnes écoutant leur Intuition réalisent statistiquement des choix beaucoup plus justes que ce que le hasard laisserait à penser.
Aujourd’hui, de nombreuses méthodes existent pour se reconnecter à cette Voix du Cœur, cette Intuition, cette «Pensée sans pensées» comme l’appellent les Maîtres: méditation, cohérence cardiaque, choc psychédélique, ou tout simplement la marche…
La marche justement occupe une place centrale. Les héros du livre cheminent sur un sentier qui se révèle être plus qu’un parcours physique. En quoi cette pratique a-t-elle de la valeur à tes yeux ?
La marche est décrite actuellement par la science comme l’activité la plus bénéfique pour l’organisme humain. Et effectivement, elle occupe une place centrale dans l’aventure de Pierre. Il s’agit même de l’outil principale décrit dans le Sentier de Daath puisqu’elle permet à Pierre à la fois de s’ancrer dans le monde matériel, que ce soit au travers des ampoules, du poids du sac, de la sueur, de la douleur et de la persévérance, que de s’ouvrir au monde spirituel, de par l’auto-hypnose induite et ces fameuses ondes alpha générées par le cerveau.
Au moyen-âge, ces états hypnotiques que l’on retrouve aussi lors des trajets en voiture sur des distances monotones, comme l’autoroute par exemple, étaient appelés «Dorveille». Il constituèrent tout un courant poétique, lié à ces longs voyages à chevaux où les chevaliers laissaient leur esprit vagabonder en faisant confiance à leur cheval pour les guider, un état très proche de ce que l’on nomme aujourd’hui rêve éveillé.
Cette marche est de plus selon moi un des meilleurs moyens d’ancrer dans la matière ce que Stanislav Grof nomme crise d’émergence spirituelle, de poser des racines vagabondes sur la terre ferme alors que l’on tutoie les étoiles. Et ce n’est sûrement pas un hasard si tous les grands mystiques, de Jésus à Hermès, en passant par Gandhi et tous les alchimistes, commencèrent leur chemin mystique par une marche.
N’est-ce pas le principe sous-jacent à tout pèlerinage ? Mettre son corps en mouvement, et le reconnecter à la nature. Car au-delà de la marche et de son principe vibratoire et hypnotique, il y a aussi ce retour aux élémentaux alchimiques: ondines, gnomes, sylphes et salamandres. Autant d’esprits légendaires qui ne demandent qu’à s’infiltrer dans le coeur des hommes trop souvent anesthésié par le confort moderne des grandes villes.
Au Moyen-Age, le Sentier sur lequel marchent Pierre, Arthur et Clara s’appelait le Chemin du Paradis. En effet, selon la Tradition, il était à même de guider l’âme du pèlerin vers les Cieux, et c’est une des raisons qui explique le succès de cette marche pendant des centaines d’années, à une époque où l’après-vie comptait plus que la vie physique.
Cette histoire est très proche selon moi du concept d’anabase telle qu’elle était décrite par les grecs: l’élévation de l’esprit de la terre jusqu’au ciel. Aussi, pour garder ce jeu de miroir entre l’horizontalité et la verticalité, cheminer sur ce sentier est aussi faire cheminer son âme sur cette échelle jacobienne où trône l’Archange Michaël.
« J’ai toujours aimé le côté free-style, le marin sur son bateau, avec sa boîte à outils qui bricole lui-même au fur et à mesure de la météo rencontrée. »
Il y a aussi des allusions à l’iboga, une plante qui altère la conscience, interdite en France et qui reste moins médiatisée que l’ayahuasca. Quel est ton parcours avec cette plante, et comment s’inscrit-elle dans ta démarche globale ?
L’Iboga est un arbre poussant principalement au Gabon et utilisé depuis des temps immémoriaux par le peuple pygmée. Appelé Arbre de la Connaissance dans le Bwiti, le culte mystico-philosophique de la forêt équatoriale, son utilisation remonterait même selon la Tradition à l’Egypte ancienne et aux initiations pharaoniques.
On consomme l’écorce de sa racine lors de rituels initiatiques visant aussi bien l’éveil de l’homme et de sa conscience, que la thérapie du corps physique, selon que l’on s’intéresse à la branche Dissumba ou Missoko. L’écorce est renommée pour son amertume et la difficulté de son voyage, très proche des N.D.E.
J’ai une première fois été confronté au Bois Sacré en France, il y a une dizaine d’année, dans un «séminaire d’initiation chamanique» comme on les appelait à l’époque. En ce temps là, l’Iboga, tout comme l’Ayahuasca, étaient légaux en France, et le potentiel dévoilé par ces plantes était tout bonnement ahurissant.
Cette initiation à l’Iboga fut pour moi un véritable Événement, qui catapulta mon esprit dans une dimension jusque là seulement intellectualisée par mes différents voyages et lectures spirituelles. On parle souvent d’Éveil dans l’hindouisme, ou de Grâce chez les chrétiens, et sûrement est-ce un des termes permettant de circonscrire ce moment vécu.
La providence fit que lors de cette initiation, je rencontrai un tradipraticien gabonais qui venait de créer une association visant elle aussi à travailler avec le Bois Sacré. Il cherchait un lieu où organiser des séminaires, et je venais d’acheter une petite maison à la campagne. Nous avons très rapidement sympathisé et c’est ainsi que j’ai appris à explorer le monde extraordinaire de l’Iboga, sur ma personne, mais aussi grâce aux retours des dizaines de personnes qui venaient à la rencontre d’elles-mêmes dans le cadre de ces séminaires.
L’originalité de cette approche était que le tradipraticien en charge de ces initiations, était très au fait de la culture occidental, et s’attachait à bien distinguer l’Iboga du Bwiti, le culte qui lui était consacré au Gabon, par essence intransmissible chez nous. Tous deux, nous avons ainsi travaillé à isoler les concepts auxquels était relié l’Iboga, et à traduire certaines symboliques pygmées dans notre société.
L’Iboga est bel et bien un outil technologique, dont le mode d’emploi était à réinterpréter selon nos codes et notre vocabulaire pour initier le voyage. En effet, autant un breuvage comme l’Ayahuasca est capable d’emporter le candidat à l’initiation, autant le Bois Sacré demande une certaine technique pour comprendre la subtilité de son fonctionnement, beaucoup moins psychédélique selon moi que d’autres substances telles la psilocybine ou le L.S.D.
L’Iboga agit ainsi beaucoup plus comme un catalyseur du fonctionnement naturel de l’esprit à son plein potentiel, que comme un adjuvant. Les visions de l’Iboga elles-mêmes sont d’une substance organique très proche du rêve, très typique et assez éloignée de ce que d’autres psychédéliques peuvent provoquer. J’ai longtemps été fasciné par le fait que lorsque l’on mange l’Iboga, on ne se sent pas sous l’emprise d’une drogue, bien au contraire. On se retrouve dans une lucidité qui parait au contraire évidente, sans aucune ivresse mis-à-part quelques vertiges, et même ces images qui nous assaillent semblent naturelles.
Bref, une fois ces plantes interdites en France, nous avons bien évidemment stoppé toute activité, et je me suis rendu au Gabon, à la rencontre de l’un des Maîtres les plus réputés du pays, Atome Ribenga, qui officialisa d’une certaine façon ma rencontre avec l’Iboga, pour autant que l’on puisse officialiser quoique ce soit entre un blanc français et une terre aussi merveilleuse mais étrangère à notre culture que le Gabon… Il s’agit là je pense d’une thématique transculturelle et éthique qui mériterait un autre débat, sachant que je resterai éternellement reconnaissant à mes frères gabonais d’avoir su m’ouvrir les yeux.
Quoiqu’il en soit, ce que j’ai vécu là-bas doit demeurer de l’ordre du secret. Pas dans le sens de quelque chose qui doit rester caché, mais plutôt dans le sens du sacré, c’est-à-dire d’événements qui ne se transmettent que de cœur à cœur.
Du fait de la législation, il est très difficile de communiquer autour de l’Iboga. Et pour reprendre quelques uns des mots d’Arthur dans le roman, je dois avouer que son interdiction m’a presque soulagé. En effet, le potentiel de cette plante, tout simplement hallucinant, n’en demeure pas moins très dangereux, mis entre de mauvaises mains. La MIVILUDES remarqua a juste titre qu’il était très facile de manipuler une personne ayant mangé le Bois Sacré, et de se poser en gourou, d’où le terme de «substance sectoïdale» employé par l’association gouvernementale.
Ne serait-ce simplement aussi parce que de très nombreuses personnes cherchent un gourou, ou un maître qui pourrait leur donner une réponse à toutes ces questions que le plus souvent elles n’arrivent pourtant pas à se formuler clairement pour elle-même…
L’autre danger, plus physique celui-ci, est l’interaction mortelle avec les opiacés qui est à mettre en regard de son rôle prédominant dans le traitement des addictions. Ainsi, le risque de rencontrer une personne venant se sevrer de l’héroïne, sous couvert d’initiation, existe bel et bien, et hors cadre médical, personne en France ne devrait prendre un tel risque.
Enfin, ces années de pratique m’ont fait comprendre qu’aucun prosélytisme n’était possible autour de l’Iboga. Je suis actuellement choqué par ces pseudos cliniques qui traitent avec la racine en Thaïlande ou au Mexique. Des cures qu’elles vendent au prix de 10.000 $ sans aucune contrepartie au peuple gabonais et pygmée, qui souffre pourtant actuellement d’une rarification de la ressource et de l’explosion des prix, au point que certaines veillées gabonaise se déroulent désormais sans Iboga. Mais surtout, elles font miroiter au patient un sevrage sans effort, une sorte de pilule miracle qui viendrait à bout de tous les problèmes.
Et pourtant, je peux l’affirmer aujourd’hui, tout n’est pas si simple, et je ne compte pas le nombre de personnes soit disant sevrées par l’Iboga qui, au bout de quelques mois, replongent dans leur addiction, ou de personnes sorties de leur dépression qui ensuite deviennent dépendante de leur chaman, voir à l’Iboga, malgré la profonde amertume de la plante et les douloureux vomissement qu’elle provoque…
Malgré tout, je persiste à penser que le Bois Sacré, l’Iboga, demeure l’une des plantes les plus extraordinaires de la création, et que son potentiel pour l’évolution de l’homme et de sa conscience reste phénoménal se devrait d’être largement plus exploré par notre monde scientifique.
Il y a quantités de voies disponibles à l’aspirant à l’éveil : yoga, méditations diverses, alchimie, plantes… Je te sais curieux et ouvert, tu as dû étudier nombre d’entre elles. En suis-tu une en particulier, ou cherches-tu plutôt à en faire synthèse personnelle ? Si c’est le cas, comment pourrais-tu nous la décrire ?
Si je devais résumer mes axes de recherche aujourd’hui, je citerai la philosophie, l’alchimie, le chamanisme et la marche. La philosophie, car j’aime cette pratique de lecture, le fait de s’asseoir, de ralentir le corps, et cette façon de faire glisser son mental le long de concepts brûlants et affutés qui viennent l’aiguiser en retour.
L’alchimie pour ce qu’elle renvoie en terme d’Art et d’images.
L’Alchimie demeure pour moi l’une des rares traditions authentiques et vivantes en occident, et même dans le monde. Une tradition plongeant ses racines dans l’histoire très ancienne de l’homme. Un contre-point à l’aridité de certains concepts philosophiques, et une affinité personnelle avec ces cathédrales, ces histoires d’athanor et de chevaliers…
Plus pertinentes selon moi qu’Ashtar Command, la 5D et les communications des Pleïades… Même si tout a sa place…
Au sein de l’alchimie, je glisse généralement un Tarot, car j’apprécie beaucoup cet outil, très adapté selon moi à la psychée occidentale, que ce soit en terme graphique ou même conceptuel. Une sorte de Yi-King pour chevalier, avec des chiens, des briques, des empereurs et des princesses… Une sorte de carte hyperspatiale permettant de se repérer et de hiérarchiser le flots d’informations dans lequel nous baignons.
Je parle ensuite du chamanisme, mais je pourrai tout aussi bien parler d’une forme d’activisme psychédélique, de sorcellerie ou de sentier empoisonné tel que le décrit Stelio. Il s’agit avant tout de l’utilisation sporadique de plantes pour moduler ma conscience, et libérer certains flux permettant l’exploration concrète de ces autres mondes.
Certaines personnes, très ancrées dans l’ésotérisme de papier, se montrent choquées de ce choix. Je leur réponds généralement que le fin du fin de l’alchimie n’est-il pas d’absorber la pierre philosophale pour accéder à la transmutation finale du corps ? Il ne fait aucun doute à mes yeux que l’absorption de plantes, dans un cadre stricte et rigoureux, a toujours fait partie des rites initiatiques, bien souvent réservée aux hauts-grades.
Je pense à la Franc-Maçonnerie et l’acacia, riche en DMT, mais aussi aux mystères d’Eleusis et l’ergot de seigle, l’onction à base de chanvre dans la Bible, voir même un lien encore plus étonnant entre le christianisme et la psilocybine révélé par certains psautiers, comme celui d’Eadwine au XIIe siècle.
Enfin, mais nous l’avons déjà évoqué, la marche, pour ce qu’elle ancre dans la terre le travail spirituel, en me permettant de le déplier à la sueur de mon front. J’aurai cependant tout aussi bien pu citer ma famille, et le combat ordinaire que présuppose l’éducation de trois enfants… Je le redis, mais garder les pieds sur terre est fondamental dans cette discipline, nombreux sont ceux à s’être brûlé les ailes comme Icare…
Alors certes, de ces 4 axes de recherches, je pourrai tenter d’en écrire un 5e sous forme syncrétique, mais j’ai toujours aimé le côté free-style, le marin sur son bateau, avec sa boîte à outils qui bricole lui-même au fur et à mesure de la météo rencontrée. Ainsi, dans le livre, j’esquisse chacune de ces voies, laissant la liberté au lecteur d’approfondir, ou pas, les directions proposées, et de tracer sa route, avec pour le soutenir, ces 4 piliers solides et immémoriaux.
« Je pense que l’enjeu est là, effectivement, dans le rapport au monde que ces pratiques peuvent instaurer. »
La vague New Age actuelle prétend elle aussi faire le syncrétisme de plusieurs pratiques. Beaucoup pointent cette spiritualité moderne comme un grand fatras prêt-à-consommer. Quel est ton regard sur cette tendance, d’un point de vue personnel et quant à l’enthousiasme grandissant qu’elle rencontre ?
Effectivement, du fait de mes voyages, des nombreuses rencontres et lectures, j’ai eu l’occasion d’explorer de nombreuses voies spirituelles… jusqu’à sentir le piège du syncrétisme new-age me frôler. Cette voie du «non-effort» qui nous fait changer de voie dès qu’un obstacle apparaît ou qu’un effort nous est demandé. Ce Pick and Choose consumériste qui perd malheureusement de nombreux candidats à l’Initiation véritable. René Guénon assimilait cela à la «contre-initiation».
Le principal danger du new-age actuel est à mon sens de proposer une spiritualité dépourvue de racines, ne voulant, ou ne pouvant proposer ce fameux Œuvre au Noir alchimique qui est celui de la décomposition de l’ego, de la putréfaction de la matière.
C’est malheureusement ce qui me choque le plus dans ce type de mouvement: à quel point les gens se disent, ou s’affichent, évolués spirituellement, à grand coup de discours, de cristaux ou de plumes. Sachant que derrière, il y a toujours ce moi-je qui les ronge, qui réclame son «nettoyage» à coup de stages généralement hors de prix. La mode du pyjama plus blanc que blanc, sachant que le grand Œuvre commence bel et bien par le noir…
Mais le noir fait peur. Combien de fois ai-je entendu dans le milieu new age «Ah l’Afrique, c’est la sorcellerie, les bas instincts. Le noir, c’est dense… Pourquoi la couverture de ton livre est-elle noire, ça fait peur ! Etc…»
Bref, étant donné que j’ai aussi flirté avec le new age, que j’y ai fait de belles rencontres, et que certains amis y ont fait de belles expériences, je ne critiquerai pas plus en avant ce mouvement, d’autant que cela m’obligerait à faire des généralités et que l’on ne sait plus où commence ce mouvement ni où il s’arrête… La mode du néo-chamanisme en fait-elle partie par exemple ? Les écrits de Bailey ? Krishnamurti ? Amma ?
Bientôt, l’Ayahuasca et l’Iboga finiront new-age, dans le sens où l’essence de ce mouvement et de digérer et d’assimiler tout ce qui porte atteinte au Contrôle de l’esprit instauré par notre société. Et effectivement, peut-être s’agit-il du plan du Nouvel Ordre Mondial pour installer une nouvelle religion commune sur toute la surface du globe ?
Bref, la tolérance me fait dire que je n’ai pas d’avis tranché sur le sujet, si ce n’est que lire un livre de Deleuze, méditer sur un jeu de Tarot, sentir le cosmos vibrer dans chacune de ses cellules entre deux vomissements avec quelques louches d’Iboga et percer ses ampoules suite à une journée de marche difficile, voici quelques ingrédients qui peuvent encore donner aujourd’hui quelques problèmes gastriques à la phagocytose du nouvel age… Généralement, si ça résiste, c’est qu’il y a du travail, donc je n’hésite pas !
Que cherches-tu au travers de ces différentes pratiques, qu’elles soient physiques ou intellectuelles ? Une libération, un rapport au monde ?
Je pense que l’enjeu est là, effectivement, dans le rapport au monde que ces pratiques peuvent instaurer. Après, tout dépend sous quel angle on envisage notre rapport au monde. Nous en parlions précédemment, en évoquant ces axes qui permettent selon Badiou de déplier l’Evénement: la Politique, l’Art, la Science et l’Amour, auxquels je rajoutais les axes verticaux de Valentin Tomberg: la Philosophie, la Magie, la Gnose et la Mystique.
C’est au centre de ce vortex que se situe ma vie, et j’observe aujourd’hui la fulgurance de ce déploiement autour de moi. Peut-on parler de libération ? C’est une question que je me pose d’autant plus que je suis père de famille, aimant et entouré de l’amour de mes proches. De quoi devrai-je me libérer ici-bas, si ce n’est des illusions qui m’empêchent de voir cet amour autour de moi, et en moi ? Ces peurs et ces mensonges qui nous masquent notre nature véritable…
En ce sens, oui, ce Sentier de Daath libère. Tout autant qu’il enracine dans ce monde merveilleux, celui de la vie sur Terre, cristallisé par le Soleil et notre Amour.
A la lumière de tout ça, où te situes-tu aujourd’hui ?
Au même endroit qu’hier, à la fois acteur et observateur du monde, immobile et en mouvement. Pour citer Gilles Deleuze :
« On devient alors soi-même imperceptible et clandestin dans un voyage immobile. Plus rien ne peut se passer, ni s’être passé. Plus personne ne peut rien pour moi ni contre moi. Mes territoires sont hors de prise, et pas parce qu’ils sont imaginaires, au contraire : parce que je suis en train de les tracer. »