De l'art ancestral de soigner à la médecine chinoise.
L'art ancestral de soigner
Les historiens pensent que « l'art de soigner ancestral chinois » comprenait des sacrifices, vraisemblablement humains dans une période très ancienne, avant et au début des Xia (2100 - 1600 av. J.-C.), pour ensuite être seulement des sacrifices rituels d'animaux.
C'est vers la fin des Xia (1600 av. J.-C.), que semblent être apparus des rudiments de diététique, d'herboristerie, de massages, de chants incantatoires et d'utilisation d'arêtes et d'os pointus pour piquer là « où cela fait mal », ce qui donnera l'acupuncture.
Ces différentes techniques empiriques se mêlaient à des interventions de sorciers, de chamans et autres guérisseurs qui, à l'aide de talismans, de drogues et breuvages divers, invoquaient des puissances numineuses (dieux, esprits, etc.)
Parmi ces puissances invisibles, il y avait les « ancêtres » dont les esprits bienveillants ou malfaisants restaient actifs dans le cercle familial ou dans la communauté après leur mort. La puissance de ces esprits était importante et il était considéré qu'ils pouvaient interférer aussi bien sur le devenir social d'un individu que sur sa santé.
Cela donna naissance au « Culte des ancêtres », dont on peut voir encore de nos jours des vestiges aux pieds de certains immeubles ou boutiques en Asie ou dans les quartiers asiatiques des villes occidentales, avec ces petits hôtels chargés d'offrandes diverses et de bâtons d'encens qui se consument.
De l'art ancestral de soigner à la médecine chinoise
Aux alentours du III° siècle av. J.-C., l'art de soigner ancestral se transforme en « médecine », discipline scientifique chinoise qui concerne tout aussi bien les soins apportés aux malades, que la prévention des maladies, l'hygiène, la sexualité sans oublier la longévité de l'existence.
Il est très difficile de déterminer avec précision à partir de quand cette intégration, scientifique progressive, s'opère dans l'art de soigner ancestral chinois, XV°, XI°, VIII° ou plus vraisemblablement à partir du VI° siècles av. J.-C. ?
Ce que l'on sait, c'est qu'aux alentours du III° siècle av. J.-C., l'art de soigner ancestral disparaît des éventails de soins des classes sociales supérieures en Chine, la noblesse chinoise, et qu'il est remplacé par la « médecine », une discipline scientifique qui est soumise aux lois naturelles, vues et comprises par des intellectuels et penseurs chinois entre VIII° et le I° siècle av. J.-C.
III° siècle av. J.-C., naissance officielle de la médecine chinoise ?
Ce que l'on peut dire, d'après les travaux de différents historiens, dont ceux de Paul Ulrich Unschuld, c'est que la médecine chinoise apparaît dès cette époque, comme une discipline qui théorise la physiologie humaine, les maladies et leur apparition ainsi que les soins à prodiguer aux malades, d'après des logiques rationnelles de causalités d'un phénomène à un autre, qu'expliquent les seules lois naturelles auxquelles tous doivent se soumettre pour le bien de la communauté, y compris l'empereur.
Toutefois, même si les textes retrouvés à la fin du XX° siècle dans différents tombeaux, dont ceux de Mawangdui, datent d'entre 200 et 100 ans av. J.-C., ces nouvelles compréhensions des maladies et de leur guérison, qui sont de véritables bouleversements intellectuels, s'élaborent dès le début de l'époque des Royaumes combattants (475 à 221 av. J.-C.), voire lors de la période des Printemps - Automnes (722 à 476 av. J.-C.).
Et la médecine occidentale ?
En Occident également, un « Art de soigner ancestral » précéda la survenue d'une médecine fondée sur des principes scientifiques, cela se produisit à partir du V° siècle av. J.-C.
À ce sujet, il est habituel de considérer que les prémisses des sciences modernes naissent dans la Grèce antique, qui comprenait alors une grande partie de celle que nous connaissons aujourd'hui ainsi que la quasi-totalité du pourtour de la mer Égée et de ses îles.
Pour les Grecs, avec Thalès, Anaximandre, Anaximène et Empédocle (entre le VII° et le V° siècle av. J.-C.), on s'intéresse principalement à la décomposition des phénomènes afin de les observer et de les comprendre d'après ce qui les constitue matériellement, d'après les matières premières qui sont en jeu.
Ainsi, les Grecs ne parleront pas des « Mouvements » comme le feront les Chinois plus tard, mais des « Eléments ». il faut entendre par « éléments » la matière qui constitue les choses visibles, ce que les physiciens occidentaux appellerons « atomes » au XIX° siècle.
À ce sujet, aux origines de ce qui deviendra les sciences modernes occidentales, il y eut en Ionie Thalès de Millet (625 - 547 av. J.-C), qu'Aristote (384-322 av. J.-C.), dépeint comme le premier philosophe grec.
Après avoir observé les résultats d'une inondation sur les végétaux en Égypte, Thalès de Millet déclara vers l'an 580 av. J.-C., que « toute vie a pour base l'eau » (précisons qu'avec cette affirmation, Thalès passe pour être le fondateur de l'histoire scientifique européenne, ce qui semble tout de même un peu léger).
Anaximandre (620 - 546 av. J.-C.) n'était pas d'accord avec lui et, vers l'an 560 av. J.-C., il parla d'une substance indéfinie, l'apeiron, comme étant à l'origine de tous les éléments.
Anaximène (585 - 525 av. J.-C.), ne croyait ni en l'eau ni en l'apeiron et proposa vers 546 av. J.-C., l'air.
Eau, apeiron, air. Nous sommes loin des subtiles et complexes énergies découvertes par les chinois à la même époque, et qui régentent l'univers. Ce qui sera formuler par « Qi », « Loi des Cinq Mouvements », « Yin-Yang ».
Il y a des différences fondamentales entre la compréhension des phénomènes naturels retenue par les Chinois et les Grecs lors de ces périodes.
En effet, lorsque l'on parle de lois naturelles, on parle de celles qui vont nous permettre de faire naviguer des « villes flottantes », ces gigantesques paquebots à touristes, sur les mers et les océans, de faire rouler des trains sur des rails à 600 km /h, de positionner en orbite terrestre la Station spatiale internationale ou encore de détruire l'humanité avec l'armement nucléaire.
On parle de tout ce que les développements technologiques de ces lois permettront d'inventer en occident à partir de la Renaissance et de l'arrivée du capitalisme mercantile.
Joseph Needham (1900-1995), un biochimiste et sinologue qui devint expert de renommée mondiale en histoire des sciences et techniques chinoises, considérait que plus d'une centaine d'inventions majeures (imprimerie, boussole, extraction de gaz à plus de 600 mètres de profondeur, etc.) avaient été découvertes en Chine jusqu'à 1500 ans plus tôt qu'en Occident à la Renaissance.
Il suggère, pour ne pas dire « il affirme », que les « inventions » européennes de la Renaissance ne sont que des copies de ce qui a été inventé en Chine avant Jésus-Christ.
Tout ce qui compose l'univers est en relation.
Les penseurs chinois des périodes préimpériales classiques (avant 221 av. J.-C.), organisent leurs connaissances par catégorisations et mises en corrélations des choses, des êtres et des phénomènes naturels.
Cette méthodologie est à l'origine de ce qui est appelé la « Loi des Cinq Mouvements » (et non pas des Cinq Éléments) qui systématise les correspondances qui existent entre tout ce qui existe dans l'univers.
Le « Qi », ce principe énergétique unificateur et universel qui nous vient de Chine.
Pour les scientifiques chinois de l'époque, ce sont ces « correspondances », ces « relations », qui participent aux processus universels de transformations de ces mêmes choses, êtres et phénomènes naturels.
Ces transformations se réalisent grâce à un mouvement énergétique, également universel, qu'ils ont appelé le « Qi » et qui lie énergie et matière dans des variations qu'ils ont appelées Yin-Yang, ou, encore, le mouvement Yin-Yang du Qi.
Pour la médecine chinoise, cette conceptualisation des lois naturelles ancre définitivement ses grands principes fondamentaux tels qu'on peut les découvrir dans des ouvrages comme le Huangdi Neijing (Suwen et Lingshu) qui est une compilation de textes médicaux réalisée du IV° ou III° av. J.-C. jusqu'au VII° siècle de notre ère, ou encore dans le Shang Han Lun, daté lui du II° siècle.
Les penseurs et scientifiques chinois de ces époques s'intéressent aux processus énergétiques des forces universelles et leurs constats s'inscrivent dans la Loi des Cinq Mouvements.
En médecine, ces scientifiques de l'époque s'intéressent aux effets de ces processus énergétiques sur notre santé et à la manière d'en rétablir les effets positifs lorsque nous tombons malades.
Pour eux, lorsque nous tombons malades, c'est qu'un déséquilibre énergétique est intervenu dans le mouvement Yin-Yang du Qi.
Ainsi, la guérison passe par le rééquilibrage de ce mouvement énergétique, on parle alors « d'harmonisation du Yin-Yang ».
Ce déséquilibre énergétique peut être dû à des causes externes, comme lorsque les conditions climatiques, des virus et, ou, des bactéries nous rendent malades, ou à des causes internes comme lorsque nos émotions, notre alimentation, notre sexualité ou encore notre vieillissement sont concernés, ou, encore, à une conjugaison de ces différentes causes.
La guérison passe évidemment, et ce dès les origines de la médecine chinoise, par le traitement des causes des déséquilibres énergétiques qui rendent malades.
Des lignes de partage entre deux compréhensions des lois naturelles.
« Mouvements » ou « Eléments », « énergie » ou « matière », « substances naturelles » ou « substances chimiques », sont autant de lignes de partage qui se sont creusées au cours de temps entre les sciences naturelles chinoises et occidentales telles qu'elles ont été comprises par deux « civilisations » que beaucoup de choses différencient.
Ce sont ces lignes de partage qui nous viennent de plusieurs siècles av. J.-C. qui séparent définitivement la « médecine » occidentale, qui semble s'être donnée corps et âme à l'industrie pharmaceutique chimique dès la fin du XIX° siècle, et la médecine chinoise naturelle, la médecine de l'avenir.
Changer : une condition sine qua non (sans quoi non), pour ne pas tomber malade ou pour guérir !
Pour ne pas tomber malades, nous devons avoir une alimentation qui soit conforme à ce que nous appelons notre « personnalité énergétique » et nous devons également, en permanence, nous adapter aux modifications de notre environnement.
Pour cela, il faut savoir changer à temps : par exemple de conditions climatiques, d'alimentation, de relations sociales ou encore de travail.
Autre exemple, savoir changer de mode de vie, c'est ce qui peut nous permettre de retarder au maximum notre vieillissement, et c'est l'un des nombreux enseignements de la médecine chinoise.